Page:Baissac - Le Folk-lore de l’Île-Maurice, 1888.djvu/404

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Peur-de-Rien entre dans le nuage.

Ce nuage-là était distribué comme une véritable maison. Il y avait des chambres, des corridors, des escaliers ; puis des portes, des fenêtres. Mais ce n’était pas du bois comme dans les maisons qui sont sur la terre, tout était taillé dans le nuage même : on eût dit du coton fin comme de la fumée. Peur-de-Rien lui-même est obligé de s’étonner.

Peur-de-Rien entre dans le vestibule : personne. Un escalier est devant lui, il monte. Rendu là-haut, il trouve un long corridor où donnent vingt chambres ; mais toutes les portes sont fermées. Où est Colle-des-Cœurs ? Peur-de-Rien met l’oreille contre une porte ; il écoute : rien. Il va à une autre porte, il écoute : rien encore. Il arrive à une troisième porte, il écoute, et le voilà qui entend comme une personne qui ronfle. C’était la chambre du loup. Son gros nez était bouché de rhume : il était obligé de dormir la bouche ouverte. Ceux qui bâtissent leurs maisons au milieu des nuages doivent s’attendre à être enrhumés : demandez aux habitants de Curepipe.

Peur-de-Rien s’éloigne sans bruit de la porte du loup. Il arrive à la porte d’une autre chambre d’où sortent comme des plaintes. « Bien sûr, c’est ici ! » Il ouvre la porte avec son bec et entre. C’était bien la chambre de Colle-des-Cœurs.