Page:Baissac - Le Folk-lore de l’Île-Maurice, 1888.djvu/352

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

au palais pour le dire au roi, et le pauvre roi fut si malheureux qu’il se mit à maigrir.

À peu près deux années se passèrent. Un jour que le roi chassait dans la forêt, les chiens levèrent un cerf. Le roi tira et le blessa. Mais le cerf ne tomba point ; il avait des ailes, il volait. Il allait, il allait, il allait, il allait ; si bien que les chiens épuisés lâchèrent pied, et que seul le roi fut de force à le poursuivre. Le cerf fuyait, fuyait, et quand il savait avoir laissé le roi à quelque distance, il s’arrêtait un instant pour se reposer et souffler, puis quand le roi approchait, le cerf repartait. La poursuite durait depuis deux jours, et le soleil allait se coucher quand ils arrivèrent au bord de la plaine. Le cerf, voyant l’espace ouvert devant lui, détala, et le roi, qui le vit bien loin en avant, comprit qu’il fallait y renoncer. Tirant donc son chapeau, il le salua en riant et lui cria : « Vraiment, l’ami, tu sais courir ! tu peux t’en vanter. Soit donc ! peut-être se retrouvera-t-on un autre jour. » Le cerf était loin et ne répondit rien.

Le roi, se trouvant seul à la lisière de la plaine, regarda. Il ne reconnaissait rien ; jamais il n’était venu de ce côté. Mais, peut-être trouverait-il une maison où se reposer pendant la nuit, et un morceau à manger, car il commençait à se sentir l’estomac un peu creux depuis deux jours. Après