Page:Baissac - Le Folk-lore de l’Île-Maurice, 1888.djvu/324

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Paulin dormit ainsi que Pauline, mais Lida ne put fermer l’œil tant le cœur lui brûlait : elle passa la nuit à se retourner sur son lit.

Le lendemain de grand matin au chant du coq, Lida courut chez sa marraine. La marraine de Lida était une vieille bonne femme si méchante qu’on ne l’appelait que « bonne femme Laffe-de-boue », parce que la piqûre de sa langue était mortelle comme celle du dard d’un laffe qui vit dans la vase. Quand une vieille femme veut être méchante, il n’y a pas de chien enragé qui puisse le lui disputer.

Lorsque Lida eut raconté à la bonne femme toute son affaire, Laffe-de-boue lui donna mille mauvais conseils pour brouiller Paulin avec Pauline. Lida retourne chez elle et se met en besogne à l’instant. Mais elle a beau inventer cent méchancetés, Paulin n’en aime pas moins Pauline, leur farine refuse de se changer en charbon. Lida écume de rage en dedans : « J’y parviendrai ! j’y parviendrai ! »

Paulin avait un chien admirable que l’on nommait Prend-tout, parce que cerf, cochon marron, en un mot toute pièce poussée par lui était une pièce prise. Eût-on offert à Paulin deux cents piastres de son chien, jamais il ne l’aurait vendu. Prend-tout aimait Pauline à un tel point qu’il n’acceptait à manger que de sa main ; un autre