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Pendant qu’ils disputaient ainsi, passe une mère poule. Zova dit au caïman :

— Eh bien ! demandons à cette mère poule si c’est toi qui as raison ou bien moi.

— Je le veux bien ; questionne-la, nous verrons.

La mère poule les écoute ; puis elle se tourne vers bonhomme Zova et lui dit :

— Je ponds, les hommes mangent mes œufs ; je couve, les hommes mangent mes poulets ; quand je suis si vieille que le coq ne s’approche plus de moi, on me tue, on me suspend à un papayer pour attendrir ma chair, on me fait cuire avec du massala, on fait de moi un moulouctani, on me mange. Est-ce que tu te figures que c’est moi qui vais empêcher le caïman de te manger ?

La mère poule s’en va ; Zova est déconcerté, le caïman rit.

Voici une vache qui vient boire à la rivière. Zova l’appelle et lui raconte l’affaire. La vache répond :

— Laissez-moi boire, donc, bonhomme ! Est-ce moi qui me chagrinerai si le caïman vous mange ! Je donne du lait aux hommes, ils le boivent, ils en font du beurre et du fromage ; j’ai des enfants, ils les tuent et les mangent ; quand je suis vieille, ils me tuent, m’arrachent la peau et la mettent à sécher ; ils m’arrachent les cornes