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au fond de ce sac il a mis quelques gros sous et beaucoup de cailloux plats. Il secoue le sac pour faire sonner les sous contre les cailloux ; puis, entrant un peu dans l’eau, il ouvre le sac et dit à la carangue : « Venez compter. » La carangue entre dans le sac, le singe le referme vivement, le porte à terre, prend un bâton et tue la carangue. Et il se tient le ventre de rire : « Aïo, ma mère ! c’est bête, un poisson ! aïo ! de l’argent et une médaille ! aïo ! laissez-moi rire ! »

Puis le singe charge la carangue sur son dos, et il va par la plaine en criant : « Carangue ! belle carangue pour cari ! belle carangue fraîche pour cari ! » Il passe devant la case d’une vieille bonne femme qui était debout sur le seuil de sa porte. « Vous n’avez pas besoin d’une carangue pour le cari ? — J’en aurais bien besoin, mais je n’ai pas d’argent pour en faire. Écoutez, si vous avez du bon riz, de bon massala, de bon piment, nous pouvons faire affaire. Je fournirai le poisson, vous fournirez le reste ; vous ferez le cari et nous le mangerons ensemble. »

La bonne femme accepte et met le cari au feu ; le singe s’assied et attend.

Lorsque le cari commence à cuire, son odeur se répand dans toute la case ; le singe ouvre ses narines, l’eau lui vient à la bouche, il dit à la bonne femme : « Mangeons maintenant ; le voilà