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tu plaisantes, hein ? Prends garde que la pirogue ne coule. Oui ! pour moi qui ai des ailes, je pourrai m’envoler, mais toi tu couleras au fond, sais-tu ! » Le singe ne fait qu’en rire : « N’aie donc pas peur, commère ! la pirogue avait comme une bosse à l’arrière, je l’ai redressée. »

Ils vont, ils vont ; le singe a faim. Il mord de nouveau dans la pirogue, le concombre se met à donner de la bande ; le singe mord de l’autre côté pour rétablir l’aplomb, le concombre coule, le singe coule, l’hirondelle s’envole.

Tandis que le singe bat l’eau de ses bras pour essayer de nager, passe mère carangue. Le singe l’appelle : « Eh vous, la mère, si vous me mettez au rivage, je vous donnerai un sac d’argent et le gouverneur vous donnera une petite médaille avec un ruban pour votre peine d’avoir retiré quelqu’un de l’eau. Dites ! ça vous va-t-il ? » La carangue est un peu bête ; elle prend le singe sur son dos et le porte à terre.

Lorsque le singe a bien secoué son eau, il dit à la carangue : « Merci, commère ; mon compliment ! vous nagez bien. Mais attendez un instant, je vais chercher votre sac d’argent ; l’affaire de la médaille se réglera plus tard. » La carangue bave de convoitise ; elle reste tout près du bord et le singe court à sa case.

Le singe revient, rapportant un très grand sac ;