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jette de toute sa force sur la tortue et la tue ! Tranquille n’a pas le temps d’arrêter sa main et lui crie :

— Ah ! mon frère ! une tortue qui vient de nous sauver la vie !

Brigand lui répond avec un mauvais rire :

— Pour qui me prends-tu ? Je mourrais de faim auprès d’un morceau ! Suis-je un imbécile ?

Il prend la tortue, la retourne, la met sur le feu, la fait cuire dans sa coque et la mange.

Tranquille pleurait, et, le cœur déchiré, il se disait : « Non, non ! C’est trop fort d’être méchant comme ce Brigand ! »

Le soleil commençait à être haut. Ils se remettent en route. Mais, qu’est-ce donc que ce chemin-là ! partout des épines, des trous, de grosses roches qui roulent sous leurs pieds. Brigand, dont la vue est mauvaise, ne fait que tomber à tout moment. Il faut qu’il prenne la main de Tranquille. Le chemin devient plus mauvais encore : à chaque pas ils courent le risque de se casser le cou. C’est sans doute un sort que l’âme de la tortue leur a jeté.

Voilà que Tranquille pose le pied sur une roche, la roche tourne. Tranquille et Brigand tombent. La pente était rapide : ils roulent, roulent et tombent dans un grand trou très profond. Ils essayent d’en sortir : impossible ; partout les