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CONSÉQUENCES POLITIQUES DE LA PAIX

affranchie, de même qu’un État tchéco-slovaque bourré d’Allemands, l’Autriche indépendante, pour durer sans péril, supposait en Allemagne des États allemands indépendants.

Telles sont les conditions dans lesquelles l’Europe fait, pour la seconde fois depuis 1871, l’expérience de l’unité allemande. Au point de vue de la politique et de la psychologie, ces conditions sont mauvaises.

À moins d’un acte de foi (qui ne peut se donner rationnellement) dans l’influence bien­faisante de la démocratie, à moins de croire sans examen que l’Allemagne nouvelle, tou­chée de la grâce, se convertira à l’idée qu’elle est une grande coupable, une grande péche­resse, qu’elle a mérité son sort et qu’elle expie justement, à moins, pour tout dire, qu’un coup de baguette magique ait changé non seulement la nature allemande, mais la nature hu­maine et la nature des choses, à moins de cela, toutes les vraisemblances (et le devoir de la politique est d’en tenir compte) sont pour que l’Allemagne ressente et ressente de plus en plus comme insupportable le traité du 28 juin. Toutes les vraisemblances sont pour qu’elle prenne à tâche de s’en délivrer et de le détruire, avec les moyens qui peuvent rester à un peuple de 60 millions d’hommes pour briser ses