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CE QUI A SAUVÉ L’UNITÉ ALLEMANDE

allemande et comme impraticable pour nous et pour les Alliés toute politique tendant à ce ré­sultat. Nous avertissions, au contraire, que les conditions étaient changées, qu’on se fût trompé du tout au tout si l’on avait cru que les liens de l’unité avaient été relâchés par la révolution de novembre et que, par conséquent, pour disso­cier l’Allemagne, il fallait songer à d’autres moyens.

L’avertissement était certainement inutile, puisqu’il a été pris comme un conseil de s’abs­tenir quand il était destiné à exciter les imagi­nations et à les rendre plus ingénieuses. Il n’eût servi à rien de ne pas se rendre compte que l’Allemagne de 1918 n’était plus celle de 1866 où les princes germaniques se battaient contre la Prusse. Il n’était pas question non plus de faire en Allemagne du séparatisme, comme nous disions, « sur commande ». Le séparatisme allemand n’a jamais été provoqué du dehors. Les expériences de Napoléon Ier ont été décisives à cet égard. La vraie politique de la France consistait à favoriser les mouvements de sécession qui se produisaient naturellement à l’intérieur, et une instruction du dix-huitième siècle au ministre de France accrédité près de la Diète germanique disait en termes excellents : « Bien entendu que M. de Chavigny évitera soigneusement de paraître jamais l’auteur de ces sortes de mouvements ; car il suffirait que l’origine en fût connue pour que ses effets contraires eussent lieu ». Ce qui n’empêchait pas