ardent plaisir de vengeance, s’était accompagnée de tout un écroulement de trônes. C’est à cet écroulement-là que nous n’avons rien gagné. Au contraire. Les moyennes et petites dynasties allemandes avaient été dans le passé le support du particularisme. Il était universellement admis qu’en cas de désastre, la désagrégation de l’Empire commencerait par les princes allemands. Bismarck le savait bien. Aussi l’Allemagne qu’il avait fondée reposait-elle sur une double assurance contre les « tendances centrifuges », c’est-à-dire particularistes, et contre la révolution. Dans son système, les princes allemands, vassalisés par les Hohenzollern, devaient être trop heureux de garder leur couronne sans avoir à craindre de mouvements populaires, l’empire de 1871 conciliant le pincipe monarchique avec le principe libéral et unitaire. Leur docilité était certaine. Ils étaient intéressés à ne plus être que de « loyaux confédérés ». D’autre part, la survivance des petites dynasties garantissait les Hohenzollern à leur tour contre une révolution. Bismarck avait calculé que les Allemands hésiteraient toujours à renverser l’empereur-roi de Berlin parce qu’une révolution en Prusse libérerait les princes du Sud et annoncerait la fin de l’unité allemande. Pour que la chute des Hohenzollern pût avoir lieu sans dommages pour l’unité, il fallait que cette condition extraordinaire fût remplie : la chute préalable de tous les autres trônes allemands.
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CONSÉQUENCES POLITIQUES DE LA PAIX
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