Page:Bainville Les conséquences politiques de la paix 1920.djvu/152

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
144
CONSÉQUENCES POLITIQUES DE LA PAIX

italien. L’effet a été rapide et profond. La déception a retourné les esprits. Elle a troublé toute la vie italienne. Et elle a ramené au pouvoir, au milieu des acclamations, l’homme qui avait été d’avis que l’Italie avait tort d’intervenir et que la guerre ne la payerait pas. Ce qu’il faut voir en M. Giolitti, ce n’est pas le neutraliste, le gibelin. C’est l’homme d’État réaliste qui est apparu dans son pays comme un sauveur. Dépourvu de sentiment et de doctrine, il dirigera l’Italie dans le sens du moindre risque et du moindre mal. Ainsi l’intervention n’aurait été qu’une parenthèse ouverte et fermée aux noces d’or de l’unité italienne. Tout serait à recommencer. Il faut savoir comment et pourquoi.

L’Autriche, qui n’était pas une nation mais un État, qu’on pouvait rogner, modeler, déplacer selon les besoins de l’heure, cette commode Autriche n’est plus. À sa place, des nations ont surgi. Et quand on taille dans la chair d’une nation, elle crie, elle résiste. L’Italie, autrefois, avait été affranchie et unie au nom du principe des nationalités. Voilà qu’une nationalité nouvelle paraissait, la yougo-slave, et c’est sur elle, à ses dépens, que l’Italie revendiquait des provinces et l’Adriatique. Ce qu’on pouvait enlever sans souffrance à l’Empire des Habsbourg, comment le prendre au peuple des Serbes, des