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CHAPITRE VI

LA CATASTROPHE


L’histoire, quand elle est vue dans ses ensembles, montre la rigueur avec laquelle les événements s’enchaînent et s’engendrent les uns des autres. Mais ces enchaînements sont lents. Ils s’espacent sur de longues séries d’années. Ils sont d’une complexité redoutable aux yeux des vrais hommes d’État qui en ont l’intelligence et qui savent que, bon ou mauvais, un germe fixé dans le sol politique peut ne lever que longtemps après qu’ils ont eux-mêmes disparu. Les exemples abondent, au cours des siècles de notre histoire que nous venons de passer en revue et, pour ainsi dire, à vol d’oiseau. Le bienfait que Louis-Philippe a valu à notre pays en créant la neutralité belge n’a porté tous ses fruits que sous nos yeux. De même les erreurs de la Révolution et de l’Empire n’ont produit toutes leurs conséquences funestes qu’avec le temps. C’est de la même manière que la guerre de 1870, en plus des effets directs de la défaite pour notre pays, a eu, pour l’Europe entière, des effets indirects, qui ont lentement formé la situation d’où la guerre générale devait sortir.

Et d’abord, après 1870, lorsque l’unité allemande fut faite et un Empire allemand fondé, les suprêmes garanties de l’Europe contre les abus de la force disparurent avec les derniers vestiges des traités de Vienne et de Westphalie. « Il n’y a plus