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la constitution de l’unité allemande, allait apporter aux imprudents et malheureux Français une longue suite de fléaux.

1813, 1815 ; la « bataille des nations » ; Waterloo ; les conquêtes perdues, l’empire napoléonien effondré comme un château de cartes, la France deux fois envahie : c’est la fin d’un grand drame, c’est la guerre populaire voulue et provoquée par les hommes de la Révolution, la guerre de 1792 qui s’achève. Car depuis la rupture avec l’Autriche, œuvre de la Législative, jusqu’à la dernière bataille de Napoléon, ce n’a été qu’une seule et même guerre qui, après vingt-trois ans de vicissitudes, des millions d’existences consommées, a fini par notre défaite et ne nous a laissé comme consolation qu’un capital de gloire… Alors le descendant de Hugues Capet revient pour sauver ce qui peut l’être, recommencer l’œuvre de ses pères. Patiemment, il s’efforce de retisser la toile. Avec courage, Louis XVIII se charge de liquider l’héritage, si lourd, qu’il a retrouvé. D’un mot étonnant dans son raccourci, Proudhon a dit, en parlant de 1815 : « Les malheureux Bourbons se remettent, comme des forçats, à la tâche… » Tâche ingrate, dont ils devaient être récompensés par la calomnie et par l’exil.

Les traités de 1815 ont été, pendant la plus grande partie du XIXe siècle, un objet de haine et d’horreur pour le patriotisme français. Par crainte de l’opinion publique, les gouvernements qui se conformaient à ces traités n’osaient eux-mêmes s’en réclamer, ne les nommaient qu’avec précaution. Thiers disait qu’il fallait les détester en les respectant et Guizot qu’il fallait les respecter en les détestant. Les derniers volumes de l’Histoire du Consulat et de l’Empire, de Thiers, qui furent publiés en 1860-1862, contiennent encore une critique ardente des traités de Vienne du point de vue national. Lorsqu’en 1863 Napoléon III déclarait que « les traités de 1815 avaient cessé d’exister »,