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celles de 1815. Sedan était effacé et non Waterloo. Là aussi il était visible, dès les orageuses discussions de la conférence de Paris, que désormais l’Angleterre, ayant anéanti la puissance navale allemande, se méfierait de la France plus que de l’Allemagne.

Et nous allions nous retrouver en face de l’Allemagne pour régler une des affaires les plus grandes et les plus difficiles qu’on eût encore vues. Le traité disait que l’Allemagne devrait réparer les ruines immenses qu’elle avait laissées chez nous. On n’exigeait d’elle ni argent comptant ni une indemnité fixée une fois pour toutes, mais des milliards dont le montant total serait déterminé dans l’avenir. L’occupation de la rive gauche du Rhin gagerait les paiements en même temps qu’elle protégerait les pays occidentaux, jusqu’au jour où l’Allemagne, ayant achevé le désarmement qui lui était prescrit, ayant donné des preuves de ses bonnes intentions, entrerait dans la Société des Nations, conçue par le président Wilson pour maintenir la paix et l’harmonie entre les peuples, comme la Sainte-Alliance, où la France était entrée peu de temps après 1815, avait été conçue par le tsar Alexandre. Telles étaient les grandes lignes de la paix qui fut conclue à Versailles le 28 juin 1919, jour anniversaire du crime de Sarajevo, dans cette même Galerie des Glaces où, le 18 janvier 1871, avait été proclamé l’Empire allemand. Deux obscurs délégués le la nouvelle République allemande signèrent avec les représentants des vingt-sept nations de toutes les parties du monde qui avaient pris part à la lutte, beaucoup d’une façon honoraire. D’autres traités, sur le même modèle, furent signés en divers endroits des environs de Paris avec ce qui restait de l’Autriche, c’est-à-dire une petite République à laquelle il était interdit de se réunir à l’Allemagne, avec la Hongrie et la Bulgarie, tandis que la Turquie repoussait les conditions qui lui étaient imposées.

D’une guerre faite à plusieurs, sortait aussi une paix faite à plusieurs, mélange de conceptions diverses, du principe de l’équilibre et du principe des nationalités, une paix qui remettait beaucoup de questions à plus tard et qu’il faudrait encore interpréter et appliquer. En France surtout, les critiques ne lui manquèrent pas. Quant à l’Allemagne, malgré l’écroulement