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que l’Autriche lui proposait au congrès de Paris. Cette alliance, que Louis-Philippe et Guizot avaient pratiquée pour éviter les bouleversements dangereux, Napoléon III n’en voulut pas, il ne pouvait pas en vouloir, parce qu’elle lui eût interdit d’affranchir la nationalité italienne. Dès 1855, en se séparant de son ministre des Affaires étrangères, Drouyn de Lhuys, partisan de l’accord avec l’Autriche, Napoléon III avait choisi. Lorsque, trois ans plus tard, Orsini eut jeté sa bombe, cet attentat ne détermina pas l’empereur, comme on l’a cru, à intervenir en faveur de l’unité italienne. Il lui servit seulement à convaincre ceux qui, dans son entourage, s’opposaient à la guerre contre l’Autriche, qu’il était imprudent de résister aux sommations des « patriotes italiens ». Bientôt, à l’entrevue de Plombières, l’appui de la France était promis au Piémont pour affranchir de l’Autriche les provinces italiennes et, l’an d’après, en 1859, les hostilités commençaient.

Après avoir combattu le tsar autocrate, l’empereur des Français se tournait contre les Habsbourg. Par là, il remplissait une autre partie du programme libéral et républicain, il désarmait une opposition. À son départ pour l’armée d’Italie, il fut acclamé dans le faubourg même où s’étaient dressées les barricades du 2 décembre. Il allait pourtant au-devant de difficultés qu’il ne soupçonnait pas. Si l’armée autrichienne fut vaincue, non sans peine, à Magenta et à Solferino, Napoléon III eut la surprise de voir toute l’Allemagne, insidieusement excitée par la Prusse, prendre fait et cause pour l’Autriche, puissance germanique. Menacé d’une guerre sur le Rhin, tandis que les Autrichiens, chassés seulement de Lombardie, résistaient encore, et que la Russie et l’Angleterre se tenaient à l’écart, se réjouissant de son embarras, Napoléon III eut hâte de signer l’armistice de Villafranca. Il abandonnait ainsi Victor-Emmanuel, les Piémontais, les patriotes italiens qui, au même moment, espéraient la délivrance totale et l’unité de l’Italie morcelée : des révolutions nationales éclataient dans les principautés, menaçant Rome et le Saint-Siège. Ainsi, la guerre contre l’Autriche pour affranchir la nationalité italienne tournait court et tournait mal. Elle avait exposé la France à un conflit européen. Elle avait déçu l’Italie elle-même, qui nous en voulut de l’avoir laissée incomplète et qui estima d’ailleurs