l’Angleterre, pour défendre l’intégrité de l’Empire ottoman, qu’il s’allia en 1854 contre la Russie. Guerre habilement choisie à tous les points de vue. Elle assurait à Napoléon III l’alliance anglaise. Elle était agréable, en France, aux catholiques, parce qu’elle avait pour prétexte le conflit des Lieux Saints revendiqués par les Russes schismatiques, et aux républicains qui haïssaient le tsar autocrate, le « tyran du Nord », persécuteur de la Pologne. Enfin, quand la puissance russe serait ébranlée, le champ deviendrait libre pour une intervention de la France en faveur des nationalités.
La guerre de Crimée ne devait pas nous rapporter autre chose. Après un siège d’un an, auquel l’armée française avait pris la plus grande part, Sébastopol tomba, la Russie s’avoua vaincue. Au congrès qui se tint à Paris en 1856, la France apparut comme la première puissance du continent. Napoléon III semblait avoir effacé et les revers de Napoléon Ier et le recul de la France, dans ce même Orient, en 1840. La Russie était refoulée loin de Constantinople. Elle était humiliée, affaiblie : de cette humiliation, il lui resterait une rancune contre nous. Seulement, l’Angleterre n’avait pas permis que les questions auxquelles Napoléon III tenait le plus, celle de Pologne, celle d’Italie, fussent même effleurées. Satisfaite de l’affaiblissement de la Russie, l’Angleterre se détachait déjà de nous. Ainsi, derrière des apparences de gloire et de grandeur, d’amères réalités se cachaient. En Prusse, un homme redoutable commençait sa carrière et il avait vu tout de suite le parti que son pays pouvait tirer de cette nouvelle situation : c’était Bismarck. La Prusse était la puissance la plus intéressée à un remaniement de l’Europe, parce que, sans la suppression de l’ordre de choses créé en 1815, elle ne pouvait pas expulser l’Autriche de la Confédération pour fonder à son profit l’unité allemande. La Russie venait d’être humiliée à Sébastopol comme la Prusse l’avait été à Olmütz. L’Autriche, « étonnant le monde par son ingratitude », avait abandonné le tsar qui l’avait sauvée de la révolution hongroise. La Prusse, en se rapprochant de la Russie ulcérée, préparait le moyen de dominer librement l’Allemagne.
Pour réussir, le plan de Bismarck, qui était à longue échéance, supposait que Napoléon III repousserait l’alliance