Page:Bainville - Heur et Malheur des Français.djvu/627

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHAPITRE XVIII

LA RESTAURATION


Répétons-nous pour mieux tenir la chaîne. Tous ces événements, dont le récit le plus succinct veut tant de place, s’étaient accomplis en vingt-cinq ans. Un Français, jeune homme en 1789, était en 1814 dans la force de l’âge. Un quart de siècle, c’est peu de chose. Et que s’était-il passé ? Dans la partie de son programme qui comprenait le régime républicain et les frontières naturelles, la Révolution avait échoué deux fois : quand elle avait dû, pour se conserver, recourir à la dictature, au pouvoir absolu, à l’Empire, et quand, au lieu de garder le Rhin et l’Escaut pour frontières, l’Empire avait, finalement, ouvert le vieux territoire à l’invasion. Alors, qu’y avait-il à faire ? Quelle solution adopter ? La seule possible, et bien rares furent ceux qui ne s’y rallièrent pas, était de rappeler les Bourbons. Talleyrand avait été un des principaux artisans de leur restauration, bien qu’il les aimât peu, parce qu’il se rendait compte que toute autre combinaison était vaine. Républicain ou impérial, le régime qui tirerait son origine de la Révolution serait condamné à la guerre, et la France avait mené la guerre jusqu’à l’extrême limite de ses forces. Rien de plus significatif que l’empressement des maréchaux de Napoléon autour de Louis XVIII. Depuis 1812, ils avaient prévu pour la plupart que « tout cela » finirait mal. Tout cela ayant mal fini, la difficulté de gouverner devait être grande pour n’importe quel régime. Mais la République avait abdiqué le 18 brumaire, l’Empire était tombé avec la défaite, et ni la République ni l’Empire ne pouvaient conclure la paix, dont la monarchie dut prendre la responsabilité.

On a dit et redit que les Bourbons, au sortir de l’exil,