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obtinrent ainsi de Léopold Ier une capitulation par laquelle il s’engageait, entre autres choses, à se désintéresser des Pays-Bas et de la Franche-Comté, à se séparer de l’Espagne, etc. L’élection permettait à la politique française de manœuvrer l’Empire dans le sens de nos intérêts.

Élus à Francfort, résidant à Vienne, les malheureux Empereurs avaient encore affaire à un Parlement qui siégeait à Ratisbonne et avec lequel ils partageaient les restes d’une autorité délabrée et précaire. L’institution de la Diète d’Empire, dont descend en droite ligne le Reichstag actuel, n’était pas nouvelle. La Diète remontait aux origines de la Germanie : un article du traité d’Osnabrück n’eut qu’à en étendre les attributions. Supposons qu’après la guerre de 1914-1915 les alliés vainqueurs décident, par exemple, que le Reichstag aura le droit de renverser les ministères et que chacun des États représentés au Conseil fédéral votera par tête au lieu que le gros des voix appartienne à la Prusse : voilà comment, au dix-septième siècle, la France se mêla de donner à l’Allemagne une constitution libérale, destinée à entretenir l’anarchie.

Il est étonnant que l’on ait pu faire dater du dix-huitième siècle le régime parlementaire lorsque l’on voit la dextérité, expression d’une connaissance directe de la vie des assemblées, avec laquelle notre diplomatie disposa les rouages de la Diète en vue de rendre tout gouvernement sérieux impossible en Allemagne. La composition de cette Chambre fut savamment compliquée. Électeurs, princes et villes formant chacun un Collège, on comptait, et avec raison, sur les intérêts et les sentiments de ces trois groupes, généralement unis contre l’autorité Impériale, mais divergeant sur le reste, pour les faire disputer entre eux. La Diète reproduisait toutes les divisions territoriales, politiques, religieuses de l’Allemagne et les échauffait en vase clos. Les villes surtout devaient y représenter l’élément démocratique, et Mazarin observait avec satisfaction « Hambourg entre autres a déclaré qu’elle respirait encore l’air de l’ancienne liberté d’Allemagne. » Un beau règlement, très minutieux, sur l’ordre des discussions et la manière de procéder au vote, rendait, sous prétexte de protéger les droits de chacun, la marche des affaires d’une lenteur infinie, parfois toute décision impossible. En outre, le programme des attribu-