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espagnole de Villaviciosa. Dès lors les pourparlers avancèrent et un armistice franco-anglais fut conclu en 1711. Les Hollandais et les Impériaux restaient intransigeants mais privés de leur appui principal. Il était temps pour nous. La place de Landrecies succombait et les dernières lignes de la « frontière artificielle » qui nous avait permis de contenir l’invasion cédaient à leur tour. Les Hollandais et les Impériaux appelaient leurs retranchements le « chemin de Paris ». Villars réussit à les arrêter et à les battre à Denain, puis à reprendre l’offensive et à délivrer les places du Nord déjà tombées au pouvoir de l’ennemi. Les traités d’Utrecht (1713) ne tardèrent pas.

Débarrassée d’un vain détail et de louanges aussi superflues que les reproches, l’histoire de Louis XIV revient à ceci : les conséquences heureuses qui étaient contenues dans les traités de Westphalie et des Pyrénées ayant été tirées, une partie de l’Europe s’était liguée pour anéantir ces résultats. À la fin de cette longue lutte, une sorte de balance s’était établie. La France avait perdu la partie sur les mers. Sur le continent, elle conservait à peu de chose près les frontières qu’elle avait acquises, des frontières légèrement plus étendues, en certains points (nous gardions par exemple Landau) que celles d’aujourd’hui, si l’on excepte le duché de Lorraine, qui n’était pas encore réuni au royaume bien qu’il fût sous le contrôle de la France. Mais nous étions écartés de la Flandre belge. Là-dessus, la volonté fixe de l’Angleterre l’avait emporté. La clause principale du traité d’Utrecht était celle qui enlevait la Belgique à l’Espagne pour la donner à l’empereur sous couleur de compensation. Pas plus de Belgique française que de Belgique espagnole sous un prince d’origine française : le motif le plus profond de l’opposition des Anglais à Philippe V avait été celui-là. Si la maison d’Autriche reçut les Pays-Bas, ce fut à la condition de ne jamais pouvoir en disposer en faveur de personne, et personne voulait dire la France. La Hollande, devenue, par Guillaume d’Orange, une simple annexe de l’Angleterre, fut chargée de veiller à l’exécution de cette clause essentielle et elle eut droit de tenir garnison dans un certain nombre de places belges. Le traité dit « de la Barrière » (c’était en effet une barrière contre la France) organisait un condominium austro-hollandais, assez