Page:Bainville - Heur et Malheur des Français.djvu/405

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sort tourna devant Pavie (1525) et le roi tomba prisonnier aux mains de l’ennemi, comme jadis à Poitiers Jean le Bon. François Ier le dit lui-même : il ne lui était demeuré que l’honneur et la vie.

Il n’est pas douteux que Charles-Quint ait cru qu’en tenant le roi il tenait la France, comme Édouard III l’avait tenue après Poitiers. Mais cette fois il n’y eut ni désordre ni trahison : le sentiment public ne l’aurait pas supporté. On vit bien un essai de complot, qui avorta, pour enlever la régence à la mère du roi, Louise de Savoie. Quelques intrigants et agents de l’ennemi tentèrent aussi, mais en vain, de réveiller le parti bourguignon à Paris et de retrouver des partisans du duc de Bourbon dans ses anciens domaines. La régente se garda de convoquer des États Généraux : c’était assez d’un Étienne Marcel. La seule opposition qu’elle rencontra fut une opposition légale, celle du Parlement de Paris qui avait été, qui était peut-être encore secrètement sympathique au duc de Bourbon. Cet incident vaut qu’on s’y arrête, car il annonce bien des choses qui vont suivre.

Par ses attributions même, le Parlement, corps judiciaire, avait pris un caractère politique. Chargé d’enregistrer les édits, il les examinait et il participait ainsi au pouvoir législatif. Il s’était formé chez lui des traditions et des doctrines. Muni du droit de remontrance, il critiquait le gouvernement, il se donnait un air libéral. Un conflit avait déjà éclaté au sujet du Concordat que le Parlement trouvait tout à la fois contraire aux libertés de l’Église gallicane et trop propre à renforcer l’autorité du roi en lui donnant la nomination aux bénéfices ecclésiastiques. Le Parlement avait dû s’incliner devant la volonté du roi, mais il restait attaché à son principe et il gardait surtout rancune au négociateur du Concordat, le chancelier Duprat : nous retrouverons sous Mazarin cette opposition du Parlement au premier ministre. Après Pavie, l’occasion parut bonne aux grands magistrats parisiens de prendre leur revanche et d’acquérir de la popularité en accusant de nos revers les financiers et leurs concussions. Mais, chose plus importante, le Parlement se plaignait que le gouvernement ne poursuivît pas les novateurs religieux, — il les appelait déjà les hérétiques, — qui commençaient à paraître en France. La résistance au pro-