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appendices

I
LE MARIAGE AUTRICHIEN DE NAPOLÉON Ier

LORSQUE Napoléon voulut épouser une Habsbourg, recommencer le mariage de Louis XVI, il mécontenta ses vieux soldats et l’opinion restée fidèle aux traditions révolutionnaires. Plus tard, les napoléoniens libéraux diront que la décadence de l’Empire a daté du jour ou Napoléon eut pris pour femme une Autrichienne. Il est curieux de lire, dans l’Histoire de Thiers, le résumé, très bien fait, du conseil où l’Empereur consulta les dignitaires sur son mariage. L’opposition entre Talleyrand, représentant de l’ancien régime, et Murat, représentant de la Révolution, est frappante :

Napoléon se mit alors à recueillir les voix, en commençant par la gauche, c’est-à-dire par le côté où allaient être exprimés les avis les moins sérieux, bien que M. de Talleyrand s’y trouvât. Il se réservait les avis les plus graves pour les derniers. Le prince Eugène, parlant après le prince Lebrun, reproduisit en termes simples et modestes les raisons que donnaient les partisans de la politique autrichienne, et qui furent répétées avec plus de force, quoique avec une concision sentencieuse, par M. de Talleyrand. Celui-ci était, après l’archichancelier, le juge le plus compétent en pareille matière. Il dit que le temps d’assurer la stabilité de l’Empire était venu, que la politique qui rapprochait de l’Autriche avait plus qu’une autre cet avantage de la stabilité, que les alliances avec les cours du Nord avaient un caractère de politique ambitieuse et changeante, que ce qu’on voulait, c’était une alliance qui permît de lutter avec l’Angleterre, que l’alliance de 1756 était là pour apprendre qu’on n’avait trouvé que dans l’intimité avec l’Autriche la sécurité continentale