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pourraient entraîner dans la suite pour la politique allemande (qui n’a plus varié depuis que Bismarck a fait école et que le succès a impose sa doctrine), le prince de Hohenlohe apprend aux patriotes français le rôle que jouait dans la République un ambassadeur d’Allemagne[1].

Bismarck avait dû sévir rigoureusement contre d’Arnim, infidèle exécuteur de ses ordres. C’est que les circonstances étaient devenues graves et menaçantes pour son système. Voici, en effet, à quel point en étaient les choses lorsqu’il obtint de Guillaume Ier la permission de destituer Arnim et d’envoyer en France l’ancien ministre du roi de Bavière.

M. Gabriel Hanotaux a écrit, en termes très justes, dans son Histoire de la France contemporaine, qu’après 1871 « les circonstances pouvaient devenir favorables à une politique blanche que le prince de Bismarck considérait comme devant lui être contraire et redoutable ». En effet, Bismarck, parvenu à constituer l’unité allemande par des procédés révolutionnaires et attentatoires aux prin-

  1. Rappelons ici, à titre d’exemple, que dans l’été de 1905, le prince Radolin, ambassadeur d’Allemagne, vint présenter à Jaurès les excuses de son gouvernement, qui avait interdit à l’orateur socialiste français de prendre la parole dans une réunion de Berlin. En novembre 1906, au Reichstag, le prince de Bulow saluait en ce même Jaurès « l’hirondelle » qui à elle seule ne fait malheureusement pas le printemps. Ainsi Jaurès était choyé par l’auswœrtige Amt et l’ambassade de la rue de Lille (dont il avait épousé la thèse marocaine) comme Thiers et Gambetta le furent avant lui par Bismarck et Hohenlohe. C’est ce qui a fait prononcer au révolutionnaire Kautsky ce mot dont la juste ironie restera : « Les idées qui, dans la bouche d’un Français, trouvent l’approbation du plus haut fonctionnaire de l’Empire conduiraient tout droit et de façon durable le sans-patrie allemand aux travaux forcés. » (Vorwœrtz du 8 juillet 1905.)