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de se marier ; il surveillait ses terres, et son premier mouvement fut de sacrifier la politique à l’amour et à l’intérêt. Mais son parti, qui le connaissait et l’appréciait, insista tellement que Bismarck se décida à siéger à la Diète. Il vint s’asseoir sans hésiter à la droite la plus extrême.

Sa première impression fut nettement hostile au parlementarisme. « La séance d’aujourd’hui était ennuyeuse, écrivait-il un soir ;

bavardages sans fin, répétitions, temps perdu. C’est étonnant quelle effronterie à parler les orateurs montrent, en raison de leurs capacités, et avec quel impudent amour-propre ils se hasardent à importuner une aussi grande assemblée de leurs creux discours.

Cependant il n’entendait pas les autres énoncer des opinions contraires aux siennes sans être violemment tenté de leur répondre. Il finit, lui aussi, par faire son discours. Un jour, l’indignation le fit bondir à la tribune. Un député libéral avait nié le caractère nationaliste de la grande renaissance de la Prusse en 1813. Tous les souvenirs d’enfance, toute l’éducation anti-napoléonienne de Bismarck, lui revinrent à l’esprit. En phrases heurtées, saccadées, mais éloquentes, il exprima son indignation et traduisit son patriotisme. À mesure qu’il parlait, il s’aperçut en même temps qu’il n’était pas un véritable orateur et qu’il réussissait à se faire entendre, à dominer son auditoire. Jusqu’à la fin de sa carrière politique, il conservera la manière de ses débuts, brusque et familière, mais en la perfectionnant