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Pour faire quelque chose, la France a besoin d’un gouvernement stable ; il lui faut une monarchie… Moi, si j’étais Français, je serais carliste.

Carliste, pour le comte de Chambord ?

Oui, oui, c’est ce que je veux dire : légitimiste. Il faut toujours défendre la Monarchie légitime

Mgr Vallet redit ces paroles telles qu’il les avait entendues, et notées dès la conclusion de l’entretien, afin de les faire connaître à Rome. On y retrouve la voix, la pensée même de Bismarck. Quelle admirable contre-épreuve ! Nous avions appris déjà, par Bismarck lui-même, par ses affirmations et ses explications non déguisées, qu’il avait jugé meilleur pour l’intérêt prussien que la France demeurât en République. Mais il savait aussi se placer au point de vue de l’intérêt français, lui dont toute l’activité était au service de l’intérêt allemand. Et ce point de vue là était complémentaire de l’autre. Bismarck avait vu si juste pour le bien de son pays et de son œuvre, il avait si profondément calculé et comparé les avantages que lui vaudrait une démocratie dans la France vaincue, il y avait donné la main avec une telle réflexion et une si nette conscience, qu’il était capable de l’effort d’abstraction nécessaire pour se mettre, si l’on veut bien pardonner l’expression, dans la peau des Français et avouer que leur intérêt voulait juste le contraire de ce qu’ils avaient adopté sous sa contrainte. Le mot célèbre du duc de Broglie accompagne et commente à merveille celui que rapporte Mgr Vallet : « Puisque M. de Bismarck