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Après ce document, ajouté à tant d’autres, n’est-on pas fondé à penser que l’Autriche n’a soulevé la question romaine que comme un moyen dilatoire ? Il était dangereux pour elle de faire une nouvelle guerre à la Prusse, en état de préparation incomplète, avec un allié également mal préparé, la France, et un autre allié à la fois peu sûr et sur lequel, au point de vue militaire, elle avait des raisons d’être édifiée. Si M. de Beust a deviné la suite des événements, on peut dire qu’il a été singulièrement bien inspiré en choisissant la question romaine comme prétexte de la neutralité autrichienne. Peut-être a-t-il jeté ce jour-là les bases de la Triple-Alliance : il contenait à la fois Bismarck en n’intervenant pas et Victor-Emmanuel en lui offrant Rome. Admettons que Napoléon III (ou un autre gouvernement à sa place) eût accepté l’évacuation de Rome contre le concours de l’Autriche. N’est-il pas évident que, par prudence, l’Autriche eût encore trouvé un autre prétexte pour se dérober ?

Il n’est pas à nier que la question romaine ait exercé son influence sur les événements de ces années fatales. Comment le nierait-on ? Mais a-t-elle eu un autre rôle que l’affaire du Luxembourg ou l’affaire des Duchés ? Elle ne fut, à la vérité, comme ces deux « affaires », qu’un prétexte, à défaut duquel il était aisé d’en trouver un autre. Les véritables responsabilités de 1870 ne sont pas là. Elles sont dans la politique napoléonienne, dans la politique du principe des nationalités, approuvée par tous les hommes de gauche, approuvée aujourd’hui encore