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saisissait cela, non point brutalement exprimé, mais indiqué clairement, pour qui savait lire et entendre, dans les communications officielles et dans les conversations privées. Le 14 décembre 1872, après un dîner de la cour, notre ambassadeur s’entretint avec Guillaume Ier. Celui-ci le pria, « avec un mélange d’intérêt et d’inquiétude », de lui rendre compte des affaires de France. M. de Gontaut-Biron comprit et s’efforça de rassurer le souverain qui, à la fin de l’entretien, content des explications reçues, déclara : « Pour notre part, ici, nous sommes satisfaits de M. Thiers. Impossible d’exécuter ses engagements avec plus de loyauté et d’exactitude ; nous avons donc intérêt à ce qu’il reste au pouvoir. » M. de Gontaut-Biron, pendant ces mois si pénibles, fut dans l’obligation constante de fournir à la cour de Prusse des explications de cette nature. — Que signifie ceci ? lui demandait-on à chaque vote de l’Assemblée, à chaque élection un peu retentissante. Notre ambassadeur écrivait à ce sujet à Thiers lui-même : « Je ne vous dirai pas combien il est dur d’avoir à traiter si souvent de toutes les expiations de cette malheureuse guerre, à rassurer sur notre situation intérieure, à donner des espérances d’ordre et de calme à des ennemis peu généreux mais puissants et très ombrageux. » Et il put entendre Guillaume Ier qui accordait, dans son discours du trône de 1873, un satisfecit à l’administration française : « L’espoir que j’exprimais ici l’année dernière de voir se développer la situation intérieure de la France dans le