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élevés, et qui commandaient les défilés ou le passage des rivières, de tous côtés ces châtelains rançonnaient les voyageurs et tyrannisaient les campagnes; leurs justiciables devinrent leurs sujets ; ils ne permirent plus qu’il fût appelé de leurs arrêts à la justice royale, et méconnurent l’autorité des envoyés royaux. Tous regardèrent comme faisant partie de leurs domaines les taxes, les redevances et les amendes, qui autrefois avaient appartenu au fisc, et s’approprièrent les tributs dont ils ne devaient être que les receveurs pour le roi. La couronne, privée de ses revenus, dépouillée de ses prérogatives par les possesseurs de ses fiefs, se vit soumise au joug du gouvernement féodal[1].

900. — Les derniers rois de la deuxième race, réduits à un domaine très borné, étaient forcés de chercher dans les nouvelles taxes qu’ils imposaient sur les sujets de leurs possessions les moyens de lutter contre l’usurpation des grands vassaux. Ceux-ci, qui n’employaient qu'à satisfaire leurs vues d’ambition personnelle des armes et des revenus qu’ils devaient consacrer au service de l’état et du monarque, adoptaient avec empressement dans leurs terres les impositions qu’il avait introduites dans les siennes. Les dispositions protectrices des capitulaires disparurent sous l’empire de coutumes nouvelles : les péages, les corvées, les droits d’abord, d’escorte, d'entrée, se multiplièrent de toutes parts; au cens ou redevance légitime, aux dîmes que la

  1. Ordonn. du Louvre, t. II, p. vii. - Esprit de Lois. - Mably, obs. liv. 1, ch. 5 ; liv. 2, ch. 5, et Preuves. Mézerai. Robertson, Hist. de Charles-Quint, sect. 3.