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Ce tarif ni le précédent ne prononçaient de prohibitions absolues : l’esprit de méditation qui caractérisait Colbert lui avait enseigné que, s’il est moins aisé pour un ministre, il est bien plus avantageux pour une nation, d’exciter en elle l’activité et l'industrie, que de triompher de la rivalité et de la concurrence de l’étranger en repoussant ses produits par, une prohibition plus facile à prononcer qu’à faire respecter. Colbert était persuadé sans doute que la défense d’importer est suffisamment représentée par des droits, lorsqu’ils sont élevés à un certain taux. Alors en effet, si l’industrie nationale ne sait ou ne veut pas, avec la forte prime que lui accorde le tarif, satisfaire au goût des consommateurs, ceux-ci ont encore le choix des fabrications étrangles, en payant un tribut volontaire dont l’état profite, au refus des industriels. Cette liberté restreinte éveille entre les différents peuples une émulation d’industrie que le monopole national étouffa au contraire. A ces avantages, les droits de douane, lorsqu’ils sont sagement calculés, en réunissent un plus grand encore, celui de prévenir l’existence et les conséquences funestes de la contrebande, également préjudiciable à l'état et aux producteurs nationaux, et qui toujours, par adresse ou par corruption, l’emporte sur les obstacles que le système prohibitif ne lui oppose qu'à grands frais. S’il n’admettait pas les prohibitions absolues, le ministre ne négligeait aucun des moyens propres à prévenir la fraude des droits et les dommages plus