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Accumulant d'abord sans discernement les impôts et les taxes, lorsque leur excès avait tari les sources de la fortune publique, ces hommes avaient recours aux affaires extraordinaires : ainsi se nommaient, comme on a eu occasion de le voir, l’engagement ou la vente du domaine royal déclaré inaliénable; l’abandon des branches les plus productives du revenu public, sous la forme d'abonnement ou d’engagement ; l'émission de rentes à gros intérêts, qui se négociaient à vil prix; les emprunts, plus onéreux encore, faits aux détenteurs des revenus de l'état; enfin, la création continuelle d'exemptions d’impôts, de privilèges honorifiques et pécuniaires, de fonctions inutiles, dont le trafic, déguisé sous le titre d'anoblissement, d’offices de survivances et de maîtrises, enrichissait les traitants, préparait de nouvelles exactions, et privait l’agriculture et le commerce de leurs capitaux.

Le génie de Colbert allait ouvrir d’autres voies, par l’application de principes plus conformes aux intérêts des peuples et à ceux de l’état, qui sont- inséparables. Mais venant, comme Sully, à la suite d’une administration désordonnée, trouvant, comme lui, les campagnes ruinées par lexcès des impôts, l’état chargé de dettes et privé de ses revenus; comme Sully, Colbert dut s'occuper d’abord de rétablir l’ordre par la réforme des abus.

La liquidation de la dette publique devait être la première et la plus délicate des opérations du nouveau ministre. La plupart de ceux qui se portaient comme créanciers étaient des fermiers et sous-fermiers des impôts, des manutentionnaires et d'autres entrepreneurs ou traitants, enrichis rapidement dans les affai-