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gouvernement. Cette résolution du jeune monarque et la paix dont jouissait la France présentaient une circonstance pour améliorer le sort des contribuables. Fouquet pouvait opérer ce changement; mais il oublia la tâche honorable que lui imposait son devoir envers le roi et l’intérêt de sa patrie. Dominé par l'attrait des plaisirs, au milieu d'une cour magnifique et galante, séduit peut-être par l'exemple de l’impunité du cardinal, il s’abandonna au luxe et à tous les genres de profusions. Ce surintendant avait dépensé dix-sept millions dans son château de Vaux et des sommes énormes dans ses autres maisons. Il prodiguait l'argent à ses maîtresses, donnait des pensions et des gratifications à tous les courtisans et gens en crédit qui pouvaient le servir. Il avait fait fortifier Belle-Isle, qui lui appartenait, et y entretenait une petite garnison; et, pour cacher ses dilapidations à Louis XIV, il le trompait ou lui présentant des états infidèles[1].

L'agrandissement du territoire obtenu par de brillantes conquêtes, l'essor que prirent les lettres et les arts utiles, le commerce maritime et l’industrie, tous les genres d’illustration enfin qui ont signalé à la postérité les belles années du règne de Louis XIV, pouvaient être retardés long-temps encore pour la France, ou remplacés par une longue suite de malheurs sans gloire, si les infidélités du surintendant n’eussent été dévoilées par Colbert, que Mazarin mourant avait indiqué au roi comme digne de sa confiance. Le ministre dissipateur et voluptueux fut puni, et Louis XIV remit la di-

  1. Particularités sur les ministres des finances, par M. de Menthion. - Siècle de Louis XIV.