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sentit de quelle utilité serait la convocation des états généraux. Huit cents-chefs des maisons les plus considérables de France s’étaient réunis à Paris à l’effet d’obtenir la délivrance des princes du sang, que le ministre absolu avait fait emprisonner. Après, leur mise en liberté, cette assemblée s’était livrée insensiblement à l’examen des affaires publiques. Elle se plaignait « des désordres de l’état, des violences et oppressions exercées depuis plusieurs siècles au préjudice des franchises, droits et immunités des gentilshommes ; » et ses discussions l’avaient conduite au projet de rétablir l’ancienne constitution du royaume et à demander la réunion des députés des trois états. Les principaux membres du clergé, qui tenaient alors l’assemblée quinquennale de l’ordre, appuyèrent les demandes de la noblesse; et le tiers-état eût saisi avec empressement sans doute cette occasion de présenter ses doléances. Anne d’Autriche, ou plutôt Mazarin dans son exil, sentit combien il importait d’éluder la convocation d’une assemblée dont les travaux lui paraissaient redoutables ; et cette fois le parlement, guidé par son intérêt particulier, agit dans celui du ministre qu’il avait frappé de proscription, parce que tout lui annonçait les états-généraux le dépouilleraient de l’importance politique qu’il venait d’acquérir. Le clergé, en effet, reprochait au parlement d’avoir renversé l’ancienne constitution du royaume ; et dans le corps politique, augmenté de cette compagnie, il ne voulait voir « qu’un monstre horrible, résultant de l’adjonction d’un quatrième membre au corps parfait que composaient le clergé, la noblesse et le tiers-état. » Dans son assemblée, la noblesse, parlant avec regret du