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publics, voulaient conserver le privilège de ne contribuer en rien aux secours dus à l'état. Déjà des clameurs s’élevaient, malgré le soin qu’avait pris le cardinal de préparer une diversion aux esprits en procurant à la capitale un opéra, spectacle nouveau pour la France; mais bientôt le mécontentement trouva une occasion de se manifester.

D'Emery avait imaginé d’établir, à l'entrée de Paris, un droit sur les marchandises destinées à la consommation de ses habitants, et qui devait les atteindre tous sans distinction de rang ni de privilège. Plusieurs grandes villes, surtout dans les pays d’états, avaient adopté ce genre d’impôt comme plus équitable, plus doux et d’un recouvrement moins coûteux que tous les autres; il convenait plus particulièrement à la capitale. Les taxes nouvelles semblaient, par leur nature, être dans la juridiction de la cour des aides : l’édit qui en établissait le tarif fut en conséquence présenté à cette compagnie, et enregistré sans difficulté par elle. Le parlement vit dans le tarif un impôt domanial; à ce titre, prétendant être compétent, il se disposait à en suspendre la perception par un arrêt, lorsque le cardinal tourna l’affaire en négociation, contre l'avis de la régente, qui était indignée de voir le cours des succès de la France dépendre d’une opposition aveugle. Le tarif préparé fut modifié de concert avec les magistrats. Ils obtinrent la suppression des droits non seulement sur le charbon, le bois à brûler, les grains et le vin, mais encore sur tous les objets provenant du cru des bourgeois de Paris. Cette dernière exception ne pouvait être dictée que par un motif d’intérêt personnel : elle était fâcheuse et injuste; puisqu’en exemptant les