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par les élus royaux. Le concours de tant de personnes dans les deux premiers degrés de répartition avait pour but d’écarter les injustices inhérentes à une espèce d'impôt qui ne reposait pas sur des bases certaines. Mais, nonobstant les règlements plusieurs fois renouvelés, le gouvernement était dépourvu d’autorité sur les propriétaires d’offices héréditaires, qui, au lieu de zèle, n’apportaient dans leurs fonctions que des prétentions fondées sur les privilèges honorifiques et pécuniaires qu’ils avaient achetés avec leur emploi; et la vanité ou l'incurie des trésoriers de France ou des élus entravaient l’opération importante de l’assiette des tailles par des difficultés qui compromettaient le recouvrement. Le nouveau règlement statua que, dans le cas où les trésoriers de France ne feraient pas délivrer les commissions nécessaires, ou s'ils faisaient difficulté d'accorder la présidence à l’intendant, « au premier refus ou délai, celui-ci devait seul faire expédier par son greffier les ordres de répartition aux élus, en leur indiquant le jour auquel il procéderait avec eux sans les trésoriers de France. » La décision de l’intendant ne pouvait être réformée que par le ministre. Cette disposition frappait de nullité les trésoriers de France, qui n’en existèrent pas moins eu égard à leur finance; mais elle livra les taillables à l’arbitraire de commissaires révocables à volonté, dont les commissions n’étaient pas même enregistrées, et qui n'attendaient leur maintien ou leur promotion que du zèle dont ils faisaient preuve. De ce moment l’autorité des intendants devint toute-puissante en fait d’imposition, et trop souvent ils n’en usèrent que pour entretenir les abus qu’ils auraient dû combattre.