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Depuis long-temps avant ce règne, les offices, et même les charges de judicature, étaient l’objet d’un trafic entre particuliers; mais il n’est pas prouvé que le gouvernement de Louis XII ait adopté cet usage pour les places de finance et moins encore pour les fonctions judiciaires. Ce prince veillait au contraire à ce que les gages des magistrats fussent exactement acquittés sur le produit des taxes additionnelles au droit de gabelle qui avaient été créées à cet effet précédemment, afin, disait-il, que les juges ne soient point tentés de céder à la corruption[1].

Afin que la justice se rendît en tout gratuitement; le roi, à l'imitation de Charles VIII, destinait chaque année un fonds de six mille livres environ au paiement de l’expédition des arrêts rendus au parlement dans les causes entre particuliers. Un comptable infidèle ayant disparu avec cette réserve, le roi, quoique pressé d'argent pour ses guerres, voulait la remplacer; mais, cédant cette fois aux conseillers qui lui représentaient que les plaideurs seraient peu gravés de payer le prix alors modique des expéditions, il concourut à son insu à transformer en un impôt bien coûteux par la suite une redevance à laquelle depuis long-temps les plaideurs s’étaient soumis envers leurs juges. Il était d’usage, quand une partie avait obtenu un arrêt favorable, qu’elle fit à son rapporteur un présent en dragées et en confitures, qu’alors on nommait épices. Ce qui n’était dans l’origine qu’un témoignage volontaire de gratitude fut bientôt transformé par les juges en une dette qu’ils

  1. Ordon. du 11 juin 1510. - Œuvres de Pasquier, t. 1, p. 99, A, et p. 404, C. - Ordon. du Louvre, t. 17, p. 594 et 593.