Page:Bailly - Histoire financière de la France, depuis les origines de la monarchie jusqu’à la fin de 1786, tome 1.djvu/220

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’acte par lequel l'autorité royale élevait ou maintenait l'impôt; fut donc substitué à la discussion libre et publique des charges du peuple et des besoins de l'état, au moment même où une assemblée des trois ordres, la plus sage et la plus respectueuse de celles qui avaient été réunies depuis Philippe-le-Bel, venait d’invoquer le principe incontestable du droit de la nation à n’être imposée que de son consentement. Par l’usage subséquent de cette formalité, le parlement se trouva en possession d’autoriser le recouvrement de toutes sommes demandées par le pouvoir royal, qui devint ainsi législateur unique en matière d’impôts. Dès lors, la fortune des particuliers fut entièrement dépendante de la bonne ou de la mauvaise administration du royaume, bien plus que des besoins réels du gouvernement : car le parlement n’élevait pas, comme il l'a fait depuis, la prétention de représenter les états de la nation, et, à ce titre, de s’opposer par des refus d'enregistrement à la promulgation des édits bursaux. Les magistrats ne prétendaient pas même au droit de remontrances. Sollicités naguère par l’université d’en adresser au roi, ils avaient répondu que « c’étoit à la cour du parlement de faire justice à ceux qui la lui demandaient, et non de la requérir; et qu’elle feroit chose indigne de soi si elle se rendoit partie requérant, vu qu’elle étoit juge[1]. » A cette époque, si voisine encore de son origine, se renfermant dans une entière obéissance à la volonté du souverain, et professant un grand zèle pour la conservation des droits et des prérogatives que s’attribuait la couronne, le parlement s’imposait, comme une consé-

  1. Œuvres de Pasquier, t. 1, p. 279, B.