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d’Anjou, irrité de la résistance qu’il rencontrait, fit piller et ravager par ses troupes les environs de la capitale. La campagne, désolée, fut abandonnée. Alors les plus riches bourgeois, très innocents de la révolte, mais qui en supportaient le châtiment dans la dévastation de leurs propriétés, se concertèrent sur les moyens de ramener la tranquillité. Ils annoncèrent que les habitants de Paris partageraient volontiers la dépense des troupes avec les autres villes du royaume, et que, si le roi voulait ne pas rétablir les gabelles, impositions, aides et autres subsides, ils s’engageraient à contribuer par semaine pour une somme de dix mille francs dont ils feraient entre eux la répartition, et qui serait conservée par un trésorier qu’ils choisiraient, pour être uniquement employée à la solde des gens de guerre lorsqu’il en serait levé, « sans que rien de ces fonds pust venir et tourner au proufict du roi ne de ses oncles. » Ces offres furent acceptées, dans l'espérance que les autres villes suivraient l'exemple de la capitale « et que l'on auroit mieux quand on pourroit. » Le traité s’observa religieusement à l’égard du roi. Une disposition de cent mille francs qu’il fit sur le trésorier de Paris ne fut pas acquittée; mais on se montra moins scrupuleux à l’égard du duc d’Anjou. « Il fist tant par beau langaige, » qu’il obtint pour son compte cette même somme que l'on venait de refuser au roi. Ce fut la dernière que ce prince enleva aux Parisiens. Guidé par sa funeste ambition, il alla ensevelir en Italie, avec sa personne, une armée et les trésors dont il avait privé la France[1].

  1. Chronique de Froissard, t. 2. - Ordon. du Louvre, préface du t. 6, p. xxix et suiv.