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paix, se formèrent en bandes sous la conduite de hardis capitaines qui distinguèrent leurs troupes par les noms de grandes compagnies, et de tard-venus. Tantôt courant isolément, tantôt réunis en corps de quinze à vingt mille hommes, pendant quatre ans encore ils commirent dans les villes et dans les campagnes toutes sortes de rapines et de brigandages. De tous côtés, des péages, des redevances, des prestations de tout genre, établis et exigés à la faveur des troubles inséparables des dissensions publiques et de l’invasion étrangère, opprimaient le commerce et les paysans vassaux des seigneurs. Ces malheureux, dépouillés, poussés au désespoir par l’excès des subsides et par les violences de la féodalité, s’étaient révoltés. Sous le nom de Jacquiers, ils se répandirent en troupes ou en corps d’armées dans la Picardie, la Champagne et l'Ile-de-France, dévastant les terres, brûlant les châteaux des nobles, et massacrant ceux des propriétaires qui tombaient entre leurs mains. Ces crimes ne cessèrent que par l’anéantissement de leurs auteurs. Une peste devenue endémique décimait la population : un grand nombre de familles abandonnèrent la France pour fuir ce fléau, non moins que les vexations excessives que commettaient les gens préposés par les états à la perception, des impôts ou de la gabelle, et qui dans leur emploi n’apportaient pas moins d’avidité que les juifs auxquels ils avaient succédé.

A son retour, cependant, le roi Jean dut s’occuper de satisfaire à la dette qu’il avait contractée.

Les juifs, toujours à la portée du fisc, obtinrent leur rappel pour vingt ans, avec promesse de protection,