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N’y a-t-il pas un autre Sinet, sans sourire, sans cigarette, qui réfléchit, seul avec lui-même, par exemple, devant sa bibliothèque où se trouvent deux livres d’un certain Louis Sinet et, à côté, la place pour quelques autres ? Celui-là, qui le connaît ? Peut-être pas lui même, car, après tout, sa femme est gentille, son chien est… un beau chien, et puis :

— Tu sais, ma chère, la maison que nous avons achetée, dans deux ans elle vaudra le double.

À son travail, M. Sinet n’est jamais saoul. Il est simplement plus ou moins rouge, avec une haleine plus ou moins à l’alcool, à la bière ou au vin, suivant ce qu’il a trouvé, quand il vient de dire :

— Eh ! petit ! guette une minute ; je reviens.

Crac ! Il tombe à M. Sinet une grosse enveloppe. Un raz de marée. Des milliers de morts ! Quelle catastrophe ! Pour vous, peut-être. Pour M. Sinet, c’est une vague copie qui le submerge ; c’est du français d’Agence à redresser ; et ces milliers de morts, peut-être bien qu’en s’arrangeant il pourra en tirer quelque joli sous-titre.

À grands coups de ciseaux, M. Sinet découpe dans un journal peu lu deux colonnes d’article :

— Que faites-vous là, Monsieur Sinet ?