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C’est un autre qui écope, et pas à N° 3 : à N° 1. Un aide de N° 2 passe trop près. Elle n’avait l’air de rien. Han ! Elle l’attrape au pantalon, avale le pied, bouffe la jambe, croque la cuisse, s’arrête de mauvais gré pour le reste.

— Ouah !

Aux cris, les patrons accourent. On emportait déjà l’homme. Ils lui donnent un regard, puis un plus long à leur machine si peu faite pour digérer de la viande humaine : elle n’avait aucun mal.

Sortis des rotatives, les journaux passent dans la salle d’expédition. Ils n’y vont pas tout seuls : il faut une machine. Voyez ces roues, ces chaînes, ces mandibules à soulever des bœufs. C’est le transporteur mécanique. On lui dit :

— Prenez ces petits paquets, transportez-les jusque-là.

Bon ! Les mandibules happent, les roues grincent, les chaînes se tendent et les petits paquets, lourds comme trois mille kilos, s’enlèvent à la file, montent jusqu’au plafond, descendent au long d’une poutre, s’abattent au but ; quelquefois ils le manquent et s’en retournent d’où ils sont venus. La distance n’est pas grande : avec ses jambes et ses bras, un homme, autrefois, faisait ces roues, ces mandibules et ces chaînes ; et il marchait plus vite. Seulement des journaux plus modestes avaient leur transporteur ; c’eût été humiliant de ne pas avoir le nôtre. Intempestif, menant grand bruit pour peu de chose, on pense à l’idiot du cirque. On dit

— Auguste.