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Le flic sorti, j’appelle Rogniez, je réclame des épreuves, je donne cinq coups de crayon et, glorieux, « l’agent Untel » devient, pas même anonyme, « un agent ».


Dieu.

Il entre à petits pas, trop parfumé, redingote, haut de forme, grosse rose à la boutonnière :

— Jé vé qué vous ne bougez pas !

On avait un pied en l’air, ou la main sur le front : on reste ainsi, il est content.

— C’est bien, mon enfant. Vous pouvez bouger.

Autrefois, il était quelque chose dans la cavalerie du roi de Grèce. Sa femme était folle, il la rossait comme son cheval, elle en est morte. Par chagrin, il est devenu Dieu. On l’appelle :

— Monseigneur Dieu.

Il est descendu du Ciel pour rétablir son règne sur la terre. Le Pape, les évêques sont ses enfants ; les chefs d’État, les ministres le sont aussi. Ces ingrats refusent de reconnaître leur Père. Il leur envoie des télégrammes : au pape, « qu’il est un âne » ; aux autres : « Corrigez-vous, ou vous mourrez sous les balles ».

Il en a, tous les mois, pour beaucoup d’argent. Il nous montre ses quittances ; il voudrait qu’on en parle :

— Poubliez, mes enfants. Quand jé sérai réconniou, vous sérez mes ministres.

En attendant, il renouvelle ses miracles :

— Jé vé qué vous ne bougez pas.