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— Dites donc, Benooi, avez-vous vu tout à l’heure cette roulotte ? Elle était drôle, n’est-ce pas ?

— Une roulotte, dit Benooi, quelle roulotte, il en passe tant ?

— Une verte, dis-je sans savoir, avec des chiens.

— Des chiens, elles en ont toutes. Pourtant oui, j’en ai vu une, il y a cinq minutes. Avez-vous besoin de ces gens ?

— Oh ! non, Benooi, ce que j’en dis… Il y a cinq minutes, n’est-ce pas ?

— Ou une heure, fait Benooi.

— Et ils allaient par là ?

— Oui, dit Benooi, par là.

— Eh bien, bonsoir, Benooi.

Tant pis, s’il me voit courir. Bientôt, je perçois devant moi le craquement d’une charrette qui roule, puis je la devine tout près dans le noir. Attention ! Je m’avance à sa hauteur, et avec tout ce que je puis de ma lanterne, je la tire hors de l’ombre. C’est bien une roulotte, peinte en rouge ; derrière, la femme qui pousse ; devant, l’homme qui fait le cheval et courant de l’un à l’autre, quelque chose d’obscur, un chien, grand comme Spitz, qui pourrait être Spitz, mais qui n’est pas Spitz puisque Spitz est noir et celui-ci tout jaune.

— Eh bien, quoi ?

Voyant qu’on espionnait sa maison, l’homme s’est arrêté agressif. Il reconnaît alors le Monsieur qui lui laisse prendre de l’eau à son puits, et devient aimable. Il touche sa casquette. Sa femme qui ne pousse plus, sourit de confiance.

— Bonsoir, Monsieur.

— Ah ! bonsoir. Je regardais votre chien. Il est beau.

— Oui, dit-il, j’en ai deux. D’autre tire sous la voiture. Là, regardez.

Je me penche entre les roues et avec ma lanterne, je tâche d’y voir.

— Mais elle est jaune cette bête.

Et furieux, je les plante là.

… Dès qu’elle me revoit :

— Eh bien, s’inquiète Marie, et Spitz ?