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MA MAISON

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Elle est bien trop simple pour vivre sur le bord de la route. Un bout de chemin lui suffit : d’ailleurs il y a les champs. Elle se tient là, modeste avec ses volets qui sont des paupières et ses tuiles qui lui font un joli bonnet enrubanné de mousse. Elle ne porte pas le chaume, le chaume ici est la coiffure pour villas de millionnaire.

À vrai dire elle n’est pas très haute. À cent mètres, avec un bon élan, il semble qu’on lui sauterait par-dessus la tête. À l’intérieur, quand je passe ma vareuse, il faut que je me surveille les bras, pour ne pas lui faire mal aux solives. Plus confortablement, je m’habille au dehors.

Et puis elle est si vieille : ses murs tout de travers, elle porte au beau milieu du pignon une grosse bosse.

Si basse, elle se rattrape à être longue : on dirait que ne pouvant porter ses étages, elle les a déposés de plain-pied autour d’elle : cela forme des granges, des étables, toute espèce de réduits comme dans une vraie ferme. On voit tout de suite qu’elle s’est bâtie pour que les bêtes y soient bien : les gens s’arrangent.

Notre lit a la largeur de la chambre — tout juste. Un centimètre de plus, il n’entrait pas. Tête en avant, il s’encastre dans le fond, entre les trois murs qui forment alcôve. Pour se coucher, il faut grimper sur une chaise, enjamber le pied, puis l’on plonge. Marie plonge la première : à mon tour je me laisse