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à peine sorties de leur manteau, pendant qu’un père, à son pupitre, leur lit un récit, hors d’un livre.

Celui-là, on ne sait pas quand il mange. D’ailleurs, pour ce qu’il y a…

La salle du Chapitre.

On ne pourrait encore se croire au réfectoire, seulement au lieu de tables, ce sont des stalles, comme à l’église. Celle de l’abbé domine un peu les autres. Nue, sans cadre, avec un grand Christ suspendu au milieu, la place est austère comme un tribunal. Ce qui s’y passe, on ne le dit pas. Mais à la fin de la journée, si un religieux a péché contre la règle, il quitte sa place, se prosterne devant l’abbé, se couche à plat ventre et à cet homme qui le juge, aux autres qui écoutent, demande humblement qu’on le châtie de sa faute.

La bibliothèque.

Il y a plus de livres que dans la bibliothèque de Westmalle qui n’en possède qu’un, mais il n’y a pas plus de lecteurs. Les mots sont vains. Un seul suffit : Dieu.

Le promenoir.

L’architecte l’a conçu très sévère : des galeries voûtées qui se perdent dans le noir, des fenêtres à barreaux, des portes à lourdes ferrures et passant là dedans, costumés en moines, des hommes dont on n’entend pas qu’ils marchent.

Ôtez la foi, c’est du théâtre.

L’horloge de la mort.

C’est au tournant d’un couloir. On tombe là-dessus, tout à coup, en surprise. Ciel ! Des crânes par monceaux, des larmes comme des œufs, un ange furieux qui souffle dans une trompette, un squelette qui serre les dents et montre l’heure avec ses doigts en os.

C’est tellement effrayant, qu’on n’a plus peur.