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objet tomba qu’elle ne songea pas à ramasser. Avec ce que Dupéché m’avait inspiré de mauvais, je la voulais. Mais Jeanne portait en elle une grande force : sa pureté. Pendant que ma chair s’enhardissait, mon esprit se rebiffait : « Ne la prends pas… » Puis il céda un peu : « Du moins, ne la prends pas sans son oui. » Oh ! pour ce oui ! Les mots, les gestes sont des passe-partout à l’usage de tout le monde. Pourquoi rappeler les miens ? Jeanne écartait mes mains. Ses yeux n’étaient pas furieux. Ils semblaient me comprendre et me plaindre beaucoup :

— Sage, Marcel, sage.

Sa bouche, en se dérobant, m’effleura. Il est certain que, la durée d’une seconde, elle répondit à la mienne. Dupéché, qu’eût-il fait à ma place ? Je n’étais pas Dupéché. Elle, elle était Jeanne. J’entendis :

— Pourquoi veux-tu cela, toi ?

Ce « toi » établissait une telle différence entre le Marcel un peu vil qui s’agitait là et le vrai qu’elle portait dans son cœur ! Je compris. Je me reculai « sage ». Sa main fut sur mon front comme une récompense. Quelle douceur ! Je tremblais encore. Sans prononcer un mot, je lui dis bien des choses.