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français, il dit : « Suivez-moi, mon enfant. » Il avait une chambre de curé, avec des murs en livres, jusqu’au plafond. Comme elle enlevait son chapeau, il fit :

— Non, gardez votre chapeau, gardez tout.

Lui, il ne garda rien. Nu comme un homme, il alla vers son mur choisir un gros bouquin d’église. Il s’assit en face d’elle, le livre ouvert devant lui. Elle voyait en dessous son ventre et ses cuisses. Il commença :

— Mon enfant, dans ce livre nous trouvons l’enseignement de Jésus. Le divin Sauveur a dit…

Elle ne devait qu’écouter : il parlait bien. Il lui fallut une heure pour dégorger à fond sa morale… Il en était à parler de faire son salut éternel.

Un pauvre homme !

Après elle rentra : « Bonsoir, chéri ! » Chéri, qui avait l’habitude d’attendre, avait soufflé la lampe. Et sans doute qu’il dormait. Elle ne trouva pas la place des allumettes ; elle tâta le lit et, voilà, ce lit était vide. Elle fit de la lumière et le divan, où il aurait pu s’endormir, ce divan, comme le lit, était vide ! Pas de Vladimir ! Ni devant la table, ni sur aucune de leurs trois chaises. Il était parti et aussi, quand elle les chercha, ses beaux vêtements qu’on pendait dans l’armoire, sa malle qu’on glissait dans ce coin et même la malle de Marie qui contenait toutes ses affaires. Parti, sans gronder, sans un mot, en douceur, comme il faisait tout.

Eh bien, non ! elle ne pleura pas. On ne pleure pas sur ce qui fatalement arrive. L’aimait-elle, d’ailleurs ? Et si toute la nuit elle sanglota