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quelques-uns qui passaient. À cause de sa culotte, on regardait beaucoup Marie. « Eh ! le pâtre ! » Une femme en pâtre, cela doit être gai, faire aller ses jambes, dire des bêtises et, au lieu de cette joie, on reste Marie, on sent du plomb dans les bras, du plomb dans les jambes, du plomb dans la tête. Et puis elle était gênée ; dans cette soie qui serrait, on devait lui voir tout.

— Mais non ! d’ailleurs, tu as ton masque.

Ils entrèrent dans une taverne, puis dans une autre. Elle fut plus à l’aise : on est assise sur ce qui vous gêne. Elle étudia comment les masques parlent d’une voix aiguë et aussi ce qu’ils disent. Avec une voix pareille, on lance plus aisément des folies : une autre parle, ce n’est plus vous. « Bonjour, beau masque », elle salua une dame. « Bonjour, toi, je te connais », elle passa la main dans les cheveux d’un buveur, dont la tête ne lui parut pas trop effrayante.

— On s’amuse ?

— Mais oui, chéri, un peu.

Après plusieurs tavernes, ils entrèrent dans un restaurant. Pour manger, elle dut enlever son loup et redevenir une Marie sérieuse. « Mais je suis gaie tout de même ! » Ils burent une bouteille de vin blanc, ensuite une bouteille de vin rouge. « Et des huîtres, chéri, c’est bon, les huîtres ! »

Son masque remis, elle devint pour de vrai un pâtre. Elle se mit à gambader. La culotte, on s’en fiche. « Mais, saute donc, Vladimir !… » Elle voulut, comme les autres, avoir un de ces mirlitons qui font du bruit. Quand ils se présentèrent pour le bal, elle en chatouilla le nez du bonhomme à la caisse.