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naître. Elle semblait fondue ; elle ne prenait presque pas de place ; on aurait dit aussi qu’elle avait d’autres lèvres.

Ce qu’on retrouvait le mieux, c’était son bonnet, et, en dessous, sa mèche à cause de la pointe qui dépassait un peu.

— Voilà, dit Pélagie, le malheur est arrivé, cette nuit, vers deux heures.

Quoi, cette nuit ? Ces mots n’avaient pas de sens. Elle ne pouvait pas croire, elle ne voulait pas croire : avant de mourir, un enfant est malade ; on le soigne, on est là quand il meurt, il ne meurt pas comme cela tout à coup, il ne meurt pas…

— N’est-ce pas, Pélagie ?

— Si, dit Pélagie, cette nuit, tout doucement, sans mal.

Et l’autre, que cette femme tenait tout joufflu dans ses bras. Sa pauvre petite Yvonne ! Elle ouvrit grands ses yeux pour en faire sortir ses larmes ; mais les larmes ne vinrent pas ; elles restaient sèches dans sa tête et la brûlaient.

— Que cela ne vous empêche pas d’enlever votre chapeau, dit Pélagie.

Elle dut pour cela commencer une série de gestes : se mettre debout, traverser la place, se débarrasser de quelque chose qu’elle tenait sous le bras, mon Dieu, le châle qu’elle avait tricoté pour que la petite eût chaud. Cela prit des minutes, et après ce temps Yvonne qui aurait pu se dresser, Yvonne qui aurait pu rouvrir les yeux, se trouvait toujours dans sa berce, morte comme tantôt. Alors elle n’eut plus qu’à se rasseoir et rester là.

Les heures passaient. Les autres remuaient ;