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— Je vais vous la montrer, Ali.

Doucement… là !… elle entr’ouvrit un bout de son châle : « Vous voyez, Ali », puis le referma, car les enfants ont peur des gens dont la figure est noire.

Monsieur lisait au salon. Il avait envoyé des oranges et aussi du vin :

— Je vous remercie, Monsieur.

— De rien… Et c’est ça le moutard ?

— Yvonne, Monsieur.

— Ah ! Yvonne.

Il la prit sur ses genoux, lui chatouilla le menton « Kiri Kiri » pour la faire rire. Mais il manquait d’habitude :

— Tenez, Marie, reprenez-la.

— Elle est jolie, n’est-ce pas ?

— Très !… J’ai beaucoup pensé à vous, Marie.

— À moi, Monsieur ?

— Oui… Le moutard, nous ne pouvons le garder ici. Il faudra le mettre en nourrice. J’en ai trouvé une bonne… des seins comme ça… elle s’appelle Pélagie. Il serait bon que vous alliez demain.

Voilà « demain » et, d’aujourd’hui, il ne reste pas grand’chose.

— Bien, Monsieur.

Pour cette nuit, elle coucha la petite dans son grand lit. Marie ne dormit pas. Elle avait de la lumière ; dès qu’Yvonne bougeait :

— Prends, prends…

Marie tendait le sein.