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une bête collée à ses flancs : il avait des contractions à lui, des secousses dont elle n’était pas maîtresse. Il la forçait à s’asseoir, quand il voulait ; il était lourd, il était gros ; dans le lit, il prenait toute la place.

Un matin, elle se réveilla tant il lui faisait mal. Hier déjà, elle avait senti cette ceinture, mais pas si brutale, pas avec ces boucles de feu qui lui creusaient les reins. Son corps travaillait jusqu’aux os et, quand elle voulut se mettre debout, ses jambes ne la portaient plus comme des jambes ; elles s’affaissaient, tels des ressorts, puis se tendaient pour la jeter en l’air.

Elle crut qu’elle serait mieux sur le parquet. Elle appela au secours.

Ali ne devait pas être loin. Il passa presque aussitôt la tête :

— Oh ! bobo ! bobo !

Et ne cessant de crier, il dégringola l’escalier. Monsieur monta tout de suite :

— Sapristi, ma fille, il était temps !

Sans l’habiller, en chemise, il la roula dans une couverture. Après, il se souvint qu’il aurait fallu des bas ; mais ils glissaient mal : il les fourra dans sa poche.

— Du courage, ma fille, nous allons descendre.

Où la menait-on ? Elle mit ses pas l’un devant l’autre, puis l’un sous l’autre, aux premières marches. Monsieur la tenait sous le bras. Ali venait devant à reculons, reproduisant en noir chacune de ses grimaces. Au premier palier, comme elle soufflait un peu, il se mit à hurler ; il ne voulait pas qu’elle souffrît ; il la porterait seul. Elle dut se laisser faire. Elle eut, tout