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encore de certain banc près de ce sapin ; encore de certain homme qui ressemblait sur le banc à ce sapin si triste.

Le lendemain, pour que dans ce square on pût voir des fenêtres ce certain homme, il alla s’asseoir, près du sapin, sur ce banc. Il n’avait rien dit à Marie de sa lettre. Il n’avait pas dit non plus, que, depuis beaucoup de jours, il venait ainsi tous les jours s’asseoir sur ce banc…

Oh non ! Il n’aimait pas cette femme. Il y a des femmes qui vivent symboliquement haut à leur troisième étage. Même dans la rue, elles sont au troisième étage. Comme Émile avec des couleurs, comme lui, s’il l’avait pu, avec des mots, ces femmes, avec des sons, affirment : « Je ne suis pas une telle… pas une telle… écoutez : … Je suis Germaine Lévine. » À ces femmes, qu’importe, à ras du sol, un Henry Boulant, si loin d’un troisième étage. Ces femmes-là ne sont pas des femmes. De son banc, on les regarde, on les vénère, on en rêve, on y pense un peu à la façon des Trappistes quand ils pensent à la Vierge. Les aimer, non. Simplement ceci : on est un journaliste, on est un raté, on porte un chapeau melon, soit ; mais au moins que cette femme sache que ce journaliste, ce raté, cet Henry Boulant, n’est pas un Henry Boulant comme tout le monde, que sous le chapeau melon dorment des idées qui ne sont pas le melon de tout le monde et qu’ainsi — oh ! presque rien — du haut de ce troisième étage, sur ce chapeau melon, elle laissât tomber un rien, une miette de sa pensée…

Il expliqua cela tout au long dans une lettre,